Dossier Protection de l’enfance : une mission sacrifiée
300 000 enfants en danger bénéficient, chaque année, d’un suivi par lesservices dédiés des départements. Sur le terrain, la situation est dramatique. Alors que la parole se libère chez les jeunes et les éducateurs, une loi censée améliorer la prise en charge a été adoptée début 2022. La France reste très loin du compte.
Nicolas est mort le 28 septembre des blessures qu’il s’est infligées après avoir agressé au couteau une professeure du collège de Benfeld en Alsace. C’est l’épilogue dramatique d’une courte existence faite de violences et de prises en charge défaillantes par les institutions de l’État.
Jeudi, un ex-cadre du groupe Tandem Educadis, qui accueille des enfants placés, a écopé de prison ferme pour avoir continué d’exercer malgré une condamnation pour proxénétisme. Mais ce dysfonctionnement en cache bien d’autres, au sein d’une entreprise qui prétend conquérir toujours plus de départements.
Depuis qu’une juge des enfants de Grenoble a ordonné son placement en août 2024, l’adolescente est coincée chez elle. Censée lui fournir un hébergement, l’aide sociale à l’enfance de l’Isère argue qu’elle n’a plus aucune place disponible.
Quand leur fille a fugué l’été dernier, les parents d’Emma n’ont pas pu compter sur des services de police débordés. Au bout de 40 jours, c’est la bénévole d’une association, spécialisée dans la recherche de personnes disparues, qui a retrouvé l’adolescente. Sinon, « que se serait-il passé ? ».
À l’issue de plusieurs années d’enquête, l’autorité indépendante a publié mercredi 29 janvier une décision d’une ampleur inédite, qui pointe de « graves » atteintes aux droits des mineurs. Elle replace l’État devant sa responsabilité : « Rester garant du respect de l’intérêt supérieur de l’enfant ».
D’après nos informations, les investigations menées dans l’affaire du meurtre de la fillette de 3 ans, tuée en septembre 2023, attestent qu’une proche de la famille a tenté d’alerter les autorités, quelques jours avant le décès. Son appel n’a pas pu être traité correctement.
Une manifestation inédite a rassemblé, mercredi à Paris, des professionnels de toute la France chargés de protéger les enfants en danger. Ils dénoncent le « délabrement » du secteur et l’absence de ministre dédié à la « grande cause nationale » décrétée par Emmanuel Macron.
Des mineurs maltraités censés bénéficier d’éducateurs ou de placements ne voient rien venir avant des mois, voire des années. Alors que les Assises de la protection de l’enfance se tenaient les 27 et 28 juin à Lyon, des magistrats décrivent les conséquences de ces délais indignes.
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Des députées de la commission d’enquête sur la protection de l’enfance ont débarqué, vendredi, dans un établissement du Puy-de-Dôme aux conditions d’accueil extrêmement dégradées. Parmi les bébés placés là, certains restent bloqués plus d’un an et souffrent de dépression. Mediapart y était.
Une commission d’enquête sur les défaillances de l’Aide sociale à l’enfance devrait débuter ses travaux début avril. Mardi soir, un « comité de vigilance » d’anciens enfants placés s’est réuni pour organiser la mise sous pression des députés. Objectif : ne pas rater l’occasion d’une réforme radicale.
Léa, 15 ans, a été retrouvée morte dans sa chambre d’hôtel, jeudi 25 janvier, à Aubière dans le Puy-de-Dôme. Placée dans cet établissement par l’Aide sociale à l’enfance, elle n’aurait jamais dû se trouver là.
Tensions parmi les salariés, violences avec les jeunes, absence de formation… Ouvert en 2003 sur le causse de Mende pour éloigner de leur milieu les adolescents placés par la justice, le centre éducatif renforcé Lozère navigue de crise en crise.
Le gouvernement a annoncé un nouveau plan pour la protection de l’enfance. Parmi les mesures, un renforcement du 119. Mais l’embouteillage est tel que de nombreuses victimes risquent de rester sans réponse et sans soutien.
Depuis 2021, une agence d’intérim, Domino Assist’m, a fait effraction dans le monde de la protection de l’enfance. Cette entreprise privée remporte ses premiers marchés et compte faire de l’accueil des enfants placés une nouvelle source de profits.
L’instance préconise de suspendre automatiquement l’exercice de l’autorité parentale en cas de mise en cause pour violences sur un enfant. Une proposition de loi adoptée jeudi à l’Assemblée va dans le même sens. Mais dans les tribunaux, beaucoup sont très réticents.
Dans le Nord, les assistantes familiales qui accueillent des enfants en danger ont le sentiment d’écoper un paquebot en train de sombrer. Le métier a de plus en plus de mal à recruter. Longtemps solitaires, les « AssFam » se mobilisent désormais aux côtés d’éducateurs, d’avocats et de magistrats.