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L’esprit critique « littérature » : de la Grande Guerre aux années de plomb

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Notre podcast culturel discute de « La Maison vide » de Laurent Mauvignier, de « Tressaillir » de Maria Pourchet, et de « La récréation est finie » de l’Italien Dario Ferrari.

« L’esprit critique » continue de frayer son chemin dans quelques-unes des très nombreuses publications de cette rentrée littéraire en vous proposant de voir éclore tout le XXe siècle depuis une maison de famille, de contempler les effets d’une rupture amoureuse contemporaine sur la psyché d’une femme-biche et enfin de participer à l’écriture d’une thèse sur une brigade anarchiste dans l’Italie des années de plomb.

On évoque en effet successivement La Maison vide, le nouveau livre de Laurent Mauvignier, publié aux Éditions de minuit ; Tressaillir de Maria Pourchet, paru chez Stock, et le roman de l’Italien Dario Ferrari, La récréation est finie, traduit aux Éditions du sous-sol.

« La Maison vide »

La Maison vide est le titre du nouveau livre de Laurent Mauvignier, publié comme les précédents aux Éditions de minuit. Si la maison du titre est vide comme une maison de famille dont il faudrait enlever les meubles après la mort d’un parent, elle est aussi remplie de tout un passé dont Laurent Mauvignier fait l’archéologie, en recourant à toute la puissance du roman.

Pour reprendre ce que le narrateur écrit dans les premières pages : « Je crois que si ce que j’écris ici est un monde que je découvre en partie en le rêvant, je ne l’invente pas tout à fait : je le reconstruis pièce à pièce, comme une machine d’un autre temps dont on découvre que le mécanisme a pourtant fonctionné un jour, et qu’il suffit de le remonter pour qu’il puisse redémarrer. »

La fiction est moins convoquée ici pour meubler des silences comme on meublerait une maison vidée que pour redonner, par l’écriture, une existence de papier, mais incarnée, à des êtres de chair tombés dans l’oubli de la généalogie lointaine, la poussière des photos sur lesquelles on ne reconnaît plus les visages, l’infamie de la collaboration dite horizontale, les non-dits du suicide ou encore les tranchées de la Grande Guerre.

Pour le dire encore comme l’auteur-narrateur de ce livre : « C’est parce que je ne sais rien ou presque rien de mon histoire familiale que j’ai besoin d’en écrire une sur mesure, à partir de faits vérifiés, de gens ayant existé, mais dont les histoires sont tellement lacunaires et impossibles à reconstituer qu’il faut leur créer un monde dans lequel, même fictif, ils auront chacun eu une existence. »

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« Tressaillir »

Tressaillir est le titre du nouveau roman de Maria Pourchet, après notamment Toutes les femmes sauf une, Feu ou Western. Il est publié chez Stock et raconte l’histoire d’une « femme rompue », à entendre dans le double sens qu’elle a rompu avec son couple et sa cellule familiale, et qu’elle est épuisée par les implications de cette rupture, tant psychiques que physiques ou matérielles.

Autrice de livres illustrés, la narratrice, prénommée Michelle, se retrouve expulsée du domicile conjugal, alternant chambre d’hôtel et recherche d’appartements sordides. Elle découvre les affres de la garde alternée et les antidépresseurs et, poussée par son agente, accepte de retourner dans l’endroit où elle a grandi pour une série d’ateliers en lycée où l’attend un ancien flirt oublié dans les recoins de sa mémoire.

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« La récréation est finie »

La récréation est finie est le titre du roman de l’Italien Dario Ferrari, publié par les Éditions du sous-sol dans une traduction de Vincent Raynaud. C’est aussi la phrase que lance Barrabas, nouvelle recrue de la « Brigade Ravachol », une bande de jeunes italiens anarchistes et gauchistes de l’Italie des années de plomb (années 1970), pour leur signifier la nécessité « d’arrêter de jouer les révolutionnaires et de passer aux choses sérieuses », en l’occurrence enlever, à main armée, un juge, au risque de tuer et d’être tué, alors que la brigade s’est jusque-là contentée d’actions spectaculaires mais sans mise en danger.

L’histoire de ce groupe nous est restituée à travers l’enquête universitaire menée par un plus tout jeune doctorant, Marcello Gori, qui a décroché par miracle une bourse de thèse, et que le tout-puissant et terrifiant professeur Sacrosanti a orienté vers l’une des figures de ce groupe, Tito Sella, écrivain et assassin passé par la case prison.

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Avec :

  • Lise Wajeman, professeure de littérature comparée qui chronique l’actualité littéraire pour Mediapart ;
  • Youness Bousenna, qui s’occupe des livres pour Télérama ;
  • Copélia Mainardi, qui écrit notamment pour Libération.

« L’esprit critique » est enregistré par Corentin Dubois pour Gong et réalisé par Karen Beun.